English below :
Mon amie s'en est allée...
Par delà les larmes, une part d'elle demeurera pour toujours vivante en moi.
Cette part, je me dois d'en prendre soin, d’y poncer la souffrance de la perte, d’y gratter patiemment les scories de la nostalgie... seul ce minutieux labeur saura raviver ce que les êtres chers nous laissent en réalité à tout jamais : ce présent intemporel qu’est l’amour.
Pourtant, aujourd’hui, jour de l'ultime hommage mon coeur demeure vêtu de gris.
Matinée de travail… plus d’une heure trente de route: Le timing sera plus que serré…
Malgré tout, je veux y être, je dois y être…
Je ne peux arriver les mains vides, je n’ai déjà pas de mots…
Ainsi, je fais intérieurement à mon amie une toute dernière promesse :
- Je t’apporterais des lys blancs ! Eux seuls, sauront te dire ce que je ne pourrais plus te dire…
Mes espoirs seront récompensés, lorsqu’arrivé à bon port, quelques minutes avant la cérémonie, je trouve les fleurs espérées sur l’étal d’un fleuriste au coeur de la galerie marchande d’une grande surface. Seul bémol, j’ai beau scruter, rechercher désespérément, je ne trouve personne sur le stand…
Les personnes alentours me disent que le vendeur censé s’occuper de la boutique ne sera pas là aujourd’hui…
Je suis inquiet, je n’ai d’autre choix pour répondre à ma promesse et le temps presse…
L’office à lieu dans quelques minutes !
Après avoir perdu un temps plus que précieux, devant l’impératif, je me résous à une extrême solution: prendre les fleurs et laisser un règlement plus que conséquent.
Je ne souhaite cependant pas partir tel un voleur ! Dans un soucis d’honnêteté, je me dirige vers la personne chargée de la surveillance afin de la prévenir aimablement.
Sa réponse fut pour le moins surprenante, tranchante et brève :
- Je ne vous laisserais pas sortir avec ces fleurs !
Le temps passe…
Je tente à nouveau, avec tact de réitérer au gardien récalcitrant l’urgence de ma situation, mais l’inflexibilité de l’homme face à ma demande se meut en rigidité.
Le temps passe, je m’inquiète…
Cherchant désespérément une porte dans cet épais mur, je lui demande la possibilité de parler à un responsable du magasin: à peine avais-je terminer ma requête que l’obtus vigile, l’air rassuré à l’éventualité de se débarrasser du problème que j’étais pour lui, pointa son épais index en direction de deux hommes en costumes:
- Justement, ce sont eux !
La providence semblait au rendez-vous: les deux directeurs de l’établissement, leurs éminences inespérées, autorités suprêmes, étaient bien « encontreusement » sorties, juste là, accessibles, à portée. Elles seules détenaient le pouvoir de trancher, arme décisionnelle ultime pouvant me délivrer enfin les fleurs tant espérées.
Le temps passe, je m’empresse de les apostropher…
De tout mon coeur battant, je leur ré-explique mon histoire en me disant que j’ai de la chance d’être tombé sur eux, qu’aucune autorité plus élevé ne pourrait scier à ma requête urgente.
Les deux hommes d’affaires, était étonnamment plus embarrassés qu’affairés à l’écoute de ma demande: le fait qu’elle les sortait d’un chemin routinier, semblait les avoir égarer dans une forêt obscure d’indécision.
Le temps passe, la chandelle de mon espoir se consume…
Observant avec tristesse leur cruelle amputation d’initiative, je les invite, dans un ultime effort, à contacter mon tout dernier espoir: le désiré fleuriste.
C’est ma dernière carte, si cela ne fonctionne pas, je devrais y aller et renoncer à ma promesse, je suis déjà en retard…
L’un des deux hommes, finit néanmoins par fouiller la poche de son veston, en sort un téléphone et compose un numéro…
Le temps s’immobilise…
Chaque tonalité s’entrecoupe d’un silence interminable…
Quelqu’un finit par répondre ! Un quelqu’un qui, à l’autre bout du fil, pourrait enfin entendre par personne interposé, la prière d’un désespéré n’ayant plus comme seul recours que sa foi.
Il suffit de quelques instants pour qu’un homme en provenance du grand magasin débarque dans la petite échoppe. Son regard chaleureux se tourna vers moi. A peine avais-je terminer de lui narrer mes péripéties, qu’il semblait avoir déjà tout compris. Il me répondit alors:
- Mais mon chère monsieur, je vous les offres ces fleurs ! Je vous les emballe immédiatement !
Cet homme, au travers des lys blancs, m’a offert à un moment ou j’en avait le plus besoin un bien précieux cadeau : son humanité. De celle qui demeure par delà les masques sociaux, qui survit aux illusoires hiérarchies, de celle qui par delà les principes, puise ses racines non pas dans le ciel factice des idéologies mais dans la terre fertile du réel.
De ce limon nait le véritable pouvoir non seulement de choisir mais d’agir en écoutant plus que les règles clivantes établies les voix profondes d’un coeur qui relie.
L.V
To Isabelle...
My friend is gone...
Beyond the tears, a part of her will always remain alive in me.
It's my duty to look after that part, to sand away the pain of loss, to patiently scrape away the dross of nostalgia... only this painstaking work will revive what our loved ones leave us forever: the timeless present that is love.
Yet today, the day of the final tribute, my heart remains clothed in grey.
A morning of work... more than an hour and a half's drive: the timing will be more than tight...
Despite everything, I want to be there, I have to be there...
I can't arrive empty-handed, I'm already at a loss for words...
So I make one last promise to my friend:
- I'll bring you white lilies! Only they can tell you what I can no longer tell you...
My hopes were rewarded when, a few minutes before the ceremony, I arrived at my destination and found the flowers I'd been hoping for on a florist's stall in the shopping arcade of a supermarket. The only drawback was that no matter how hard I searched, I couldn't find anyone on the stall...
The people around me tell me that the sales assistant who's supposed to be looking after the shop won't be there today...
I'm worried, I have no choice but to keep my promise, and time is running out...
The service is in a few minutes!
After wasting a great deal of precious time, I had to come up with an extreme solution: take the flowers and leave a hefty payment.
But I don't want to leave like a thief! In the interests of honesty, I went over to the person in charge of surveillance to give her a friendly warning.
Her response was surprising, to say the least, sharp and brief:
- I wouldn't let you go out with those flowers!
Time passes...
I made another tactful attempt to reiterate the urgency of my situation to the recalcitrant guard, but the man's inflexibility in the face of my request turned to rigidity.
Time passed and I began to worry...
Desperately looking for a door in this thick wall, I asked him if I could speak to a shop manager: no sooner had I finished my request than the obtuse security guard, looking reassured at the prospect of getting rid of the problem I was for him, pointed his thick index finger at two men in suits:
- That's them!
Providence seemed to be at hand: the two directors of the establishment, their unhoped-for eminences, the supreme authorities, had 'unintentionally' come out, right there, accessible, within reach. They alone had the power to make the final decision, the ultimate weapon for delivering the flowers I'd been hoping for.
As the time passed, I hurried to call them...
With all my heart beating, I explain my story again, telling myself that I'm lucky to have stumbled upon them, that no higher authority could saw through my urgent request.
The two businessmen were astonishingly more embarrassed than busy as they listened to my request: the fact that it took them off a routine path seemed to have led them astray into a dark forest of indecision.
Time passed, the candle of my hope burnt out...
Sadly observing their cruel loss of initiative, I invite them, in a last-ditch effort, to contact my very last hope: the longed-for florist.
It's my last card; if it doesn't work, I'll have to go and renege on my promise, I'm already late...
One of the two men reached into his jacket pocket, pulled out a telephone and dialled a number...
Time stood still...
Each dial tone is interspersed with an interminable silence...
Finally, someone answers! Someone who, at the other end of the line, could finally hear, through someone else, the prayer of a desperate man whose only recourse is his faith.
It only took a few moments for a man from the department stores' to come into the little shop. His warm gaze turned to me. No sooner had I finished telling him about my adventures than he seemed to have understood everything. He replied:
- But my dear sir, I'm offering you these flowers! I'll wrap them up for you immediately!
Through the white lilies, this man gave me a precious gift at a time when I needed it most: his humanity. A humanity that transcends social masks, that survives illusory hierarchies, that transcends principles, that draws its roots not from the artificial sky of ideologies but from the fertile soil of reality.
From this silt is born the true power not only to choose but to act, listening more than to the established rules of division to the deep voices of a heart that connects.
L.V
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